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16 juillet 2025

#Breaking News : Shadow Ticket — la couv !

Il est longtemps resté Cover coming soon. 

Or, aujourd’hui maintenant tout de suite il y a une heure de chez nous, la voici enfin !

La couverture du prochain Thomas Pynchon :


On vous laisse le soin de l’agrandir, histoire de la savourer, ce qui nous laisse le temps de vous annoncer ce que l’on a appris il y a quelques temps déjà :

La traduction en French-de-chez-nous sera réalisée sans filet et de main de maître par :

—> Nicolas Richard

Ceux qui n’ont ni une mémoire de poisson rouge ni d’escargot se souviendront que le même Nicolas avait pris le relais du madman Claro en matière de translation pynchonienne. 

Non pas au pied levé mais à mains sur le clavier (on ignore si le sien est cannibale or not, mais ceci est une autre histoire). 

Donc, et comme il se doit : on bave d’impatience. 

— la suite sous peu

4 mai 2025

#Breaking News : La maison des feuilles -- Mark Z. Danielewski -- Édition collector en vue chez Monsieur Toussaint Louverture

Après le retour de Pynchon dont on attend toujours la couverture ainsi que le nom du traducteur vers le french qui va s'y coller (claro ? Nicolas Richard ?)
Après le retour de Mark Z. Danielewski avec Tom's Crossing (un traducteur vers le french en vue or not ?) dont on zébulonne de connaître les premiers retours de certains lauréats.
On a appris soudain, au détour de deux (sauf erreur) posts des éditions Monsieur Toussaint Louverture, oui, ceux qui nous avaient fait don (pas d'autre mot) d'une version remastérisée full color en français à tomber par terre, digne du travail d'un faussaire de la même version VO, que....


Vous avez bien vu : 
Une édition collector de La maison des feuilles full color remastérisée est actée et en préparation.

Les envoyés spéciaux de l'esc@rgot sont sur le coup et ne manqueront pas de vous informer de la suite (sous peu) des événements.

Dans cette attente, n'éteignez pas vos écrans.

Stay Tuned, quoi.

-- la suite sous peu

9 avril 2025

IL est de retour !

Depuis plus de dix ans on l'attendait.
Qui ça ?
Celui dont on ne -- mais non, pas Voldemort -- connait pas le visage (du moins l'actuel visage, sauf erreur de notre part).
Et il sera disponible en VO le 7 octobre 2025


En sait-on davantage sur ce prochain Pynchon ?

La réponse est : of course.

Preuve#1 : 


On continue : 

Preuve#2 :

Pré-commandé dans la foulée, ça s'imposait.

Question : qui se coltinera la translation vers le French ?


Une chose est certaine : la fin d'année 2025 sera riche en événements à faire baver un esc@rgot et d'autres (on y reviendra).

Affaire(s) à suivre... sous peu (on l'espère vivement)

25 janvier 2024

[It is about] L'échec

It is about L'échec 
Comment échouer mieux
Faisons court :
quand Claro sort un essai, c'est de cela qu'il s'agit, force nous est de le reconnaître, il est loin d'échouer -- surtout pas sur la plage abandonnée ; coquillages et crustacés repasseront (désolé pour la page 11).
Loin du formalisme un rien pompeux qu'on s'attend à trouver généralement dans ce genre d'ouvrage, le traducteurauteuréditeur, (ici, on pourrait ajouter "rugbyman" -- si, si) fait un pas de côté, tord le cou à l'académisme et cuisine l’échec jusqu’à le pousser dans ses derniers retranchements transformant ainsi l'essai (d'où le rugbyman si, si cité ci-dessus) en --  
En quoi, au juste ?

Eh bien...

Dans son infinie bonté, l'esc@rgot entend livrer la recette de cet opuscule, recette qui permettra à Claro d'éviter que les cerises ne restent au fond du clafoutis — nulle invention de notre part, cet échec personnel, il le liste, avec d'autres, page 95 : 

Parvenir à confectionner un clafoutis aux cerises digne de ce nom (chaque fois les cerises restent au fond, un peu comme les bonnes intentions quand on veut écrire un roman basé sur des faits réels et sans intérêt).

[après recherches, il s'avère que deux écoles s'affrontent à ce sujet. L'une prône "les cerises recouvertes par l'appareil", l'autre, "les cerises sur l'appareil". Certes, ceci ne fait guère avancer le schmilblick mais permet une illustration... d'échouer mieux.]

Recette, donc : 

  1. Préchauffez en introduisant la partie d'échecs la plus courte du monde
  2. Graissez le moule à tarte ou à manqué (tiens donc...) à l'aide d'une première traduction sur laquelle buter [Ah ce It is about water qui devient L'eau !]
  3. Dans un cul de poule, zestez le citron de la traduction en compagnie de Oui-Oui sous le volcan, ou Au-dessous du volcan, voire Soûl le volcan. (page 42 -- merci !)
  4. Ajoutez les oeufs et les jaunes d'oeufs et mélangez vivement pour ne pas faire de grumeaux à l'aide d'entretemps en autant de définitions de l'échec, détournements de citations, psaumes, etc -- gérez, en somme, faites preuve de résilience mordorée (là, j'en connais un qui ne lira pas cette notule jusqu'au bout -- ça, c'est de l'échec !)
  5. Ajoutez enfin le lait du premier visage de l'échec (Kafka) et la crème liquide des Castors Juniors ou quatre façons d'échouer, tout en mélangeant pour obtenir un appareil lisse et homogène (ce qui n'est pas le cas ici, rien n'est lisse, les grumeaux de l'humour font tout le sel de l'appareil, justement)
  6. Versez l'appareil dans le moule... en donnant à lire Le Pont, Histoire d'un échec -- nouvelle qui traîne un peu des pieds, puis racle ses godillots jusqu'à la chute (ça échoue bien, en effet)
  7. Répartissez uniformément -- ah non, uniformément, certainement pas ! on l'a dit quelques lignes plus tôt, puisque Pessoa est appelé à la barre (et pas pour une histoire de cerises).
  8. Enfournez pour la cuisson avec le Vertigo dont on vérifie la cuisson en le piquant deux fois (une séance au cours de laquelle on apprend que le verre, t'y go sauf si Alfred est aux commandes.
    [ouais, bon, c’est nul, mais cet échec-ci vous est généreusement offert par l’esc@rgot g@rpien, ne me remerciez pas, j'échouerai mieux la prochaine fois.]
  9. À la sortie du four, attendez que Cocteau soit complètement refroidi (pardon ?) en troisième visage de l'échec pour le... démouler délicatement (hum).
  10. Conservez L'échec au réfrigérateur de la lecture - je sais lire les mots, mais sais-je lire ? [on y retrouve avec plaisir le madman Bovary et ce Nous-qui-est-le-Je-?] avant dégustation de la postérité et du calendrier intime du livre, infini...
Dégustez.
Ô combien !
Mélange d'érudition, d'humour, d'anecdotes personnelles (codées ou non), cet échec  essai nous a fait penser à quelqu'un dont on corne aussi nombre de pages savoureuses...




... un certain DFW.
Pas celui de C’est de l’eau (puisque It is water — et non It is about water)
Mais plutôt le DFW de Considérations sur le homard (volume 2).


Un exemple déjà utilisé ici

Et des comme ça, il y en a légion.

On en redemande, parce que si c'est un échec, on se ferait volontiers une deuxième saison, histoire d'échouer mieux.

[NDE -- note de l'esc@rgot -- on ne saurait que trop recommander le visionnage de La grande librairie du 17 janvier 2024  mais surtout l'écoute du podcast Le Book Club du 18 janvier 2024 en guise de savoureux compagnons à cette lecture]


Claro, L'échec. Comment échouer mieux



-- la suite sous peu










10 janvier 2024

Le marché du mois is back (ou : que lire après Horcynus Orca)

Il y a bien longtemps, dans une coquille lointaine (& oubliée), un certain marché du mois
revenait avec une régularité aléatoire (sans passer par la case départ, ne touchez pas vingt-mille) et nanti d'images (floues, mea culpa) à caractère d'ambiance. En bref et pour faire court (sic), cliquez sur la catégorie idoine... dénommée non pas "idoine", mais "le marché du mois" (logique, Captain Kirk), vous comprendrez. Donc donc donc, le voici de retour tandis que l'on s'approche de la terre ferme après avoir navigué près de trois mois en mer de Charybde et Scylla à bord de l'incroyabladmirable Horcynus Orca, sacrefeu !
Ce marché du mois est la réponse à la question, ô combien épineuse après un tel roman océan&poustouflant : "que lire après" ? C'est fort de découvertes et conseils d'autres lecteurs d'arriguien & autres que l'on a opté pour ce qui va suivre, et, on l'a remarqué, diffère quelque peu des lectures des mois/années précédentes. On ne remerciera donc pas assez Benoît Virot, Henri, Pascal Leonard, Paninietzsche, et on en oublie (qu'ils veulent bien nous pardonner notre mémoire d'escargot). Single up all lines ! D'abord, pour rester en mer : Armen.
Ensuite : Paterson
Et encore : L'obscène oiseau de la nuit
Et pour le plaisir d'échouer sur la plage, coquillages et crustacés (clin d'oeil) : L'échec
PS : celui-ci nous demandera de rendre visite à un bouquiniste à portée de rames... sous peu Femme par magie
Vous savez tout. la suite sous peu

21 juin 2010

Et Livre vain devint CosmoZ - Claro - Actes sud - 08/2010

Après les extraits coups de cœur de CosmoZ, glanés sur FaceBook, et postés ici-là en forme de faux scoop mais à l'attention de ceux qui ne sont/veulent pas réseausocialiser, voici une forme de, disons, collector.
Exhumé (c'est une habitude) de l'époque bénie qui me valut d'être maudit d'avoir copy/pasté un backfromoz point blogspot point com désormais emporté par un des trous noirs de l'espace numérique.
Certains s'en souviennent encore.
Ce qui va suivre date d'avril 2006 (sauf erreur).
CosmoZ n'était pas encore CosmoZ mais Livre vain.
En référence, si l'on peut dire, à Livre XIX, du même Claro, paru quelques années plus tôt.
En l'état actuel de ma boîte aux lettres, j'ignore si ce passage a subi des modifications dans ce qui sortira chez votre libraire préféré le 18 août prochain. Si quelqu'un, quelque part, de l'autre côté de l'arc-en-ciel, ceci dit sans gravité aucune, a le moyen de comparer, qu'il parle ou se taise à jamais.

Bien entendu, si cet extrait gêne, ce que je comprendrais aisément, je le retirerai sans aucun délai ni condition (quoique... boîte aux lettres... attendre le 18 août... -- non, je ne chantage pas, je plaisante).

Maintenant, attachez-vos ceintures, ça va décoller.
Et décoiffer.

Ça commence par un cyclone



Dans le cyclone, l’œil, et dans l’œil, rien, sinon des milliers d’autres cyclones tordus par le vent et par le vent chassés, de longs cônes de mousseline grise qui se déboîtent, se déhanchent et se crispent en saccades hip-hop, impossible de savoir quelle forme y prend le silence, à quel degré d’imposture ou de turbulence il s’y trouve porté, quels bruits y sont disséqués quels autres embaumés, impossible d’y déployer une pensée assez solide pour qu’elle ait le moindre espoir d’en réchapper : aucune, nous le savons, n’y résisterait, car la tempête se lève, sévit, et ses vents se liguent, formant un bulbe convoluté aussitôt étiré en entonnoir, la couche d’air froide patine et cahote sur la couche d’air chaud, obligeant celle-ci à s’ériger en colonne de disques furieux, articulés ; l’air a cessé d’être pure volition horizontale et façonne ses parois intérieures à coups de rotations, les convulsions s’inventent discipline et désastre – la tornade naît, elle se visse et se désosse sur elle-même avec volupté, singeant parfois l’immobilité à une vitesse de cinq cents kilomètres/heure, compressant heures et distances, s’avance et se recentre à force de dévorations, de régurgitations, la voici ventousée à la terre et dans le ciel couronnée de vide, il est trop tard, car j’ai bien peur, oui, j’ai bien peur que nous soyons de nouveau au Kansas, Toto.
Tant mieux (exit Toto), car c’est au Kansas que les tornades trouvent leur terrain d’expression le plus abouti, le plus pragmatique, dans cette région usée par l’entêtement des premiers colons et la résistance d’Indiens déchus. Alcool, fusils, concessions, trahisons : c’est un schéma depuis longtemps intégré. Fusant du sud de l’Etat puis traçant vers le nord selon d’invisibles lignes de rafales, les tornades profitent de l’aridité et de la sécheresse du terrain pour renoncer aux plaines craquelées du Nouveau-Mexique, inexorablement attirées par les Grands Lacs magnétiques.
C’est un fait : il n’a pas plu depuis trois jours et trois nuits. L’après-midi s’est attardée dans les fissures du sol et les ombres torves des arbres. Conditions idéales, chiens haletant sous les tracteurs, siestes pliées et repliées sur elles-mêmes, dans le drame d’un lit ou sur la balancelle d’un porche. Dans le champ de blé, l’épouvantail danse sans bouger, tous les téléviseurs sont soudain brutalement siphonnés de l’intérieur par un appel d’air, les ampoules cognent, clignent puis s’éteignent, les volets giflent en morse les bardeaux, la poussière hésite et sautille, très vite ça racle et grince, la lumière semble baisser par à-coups, comme la vue d’un mourant qui voit le soir écraser tout ce qu’il sait.
Tout là-bas, le nuage entame sa descente en une volte lente et de plus en plus grise, il enfle jusqu’à atteindre une épaisseur de cinquante pieds, aspire frénétiquement tout ce que sa trompe annelée peut rencontrer à la surface de la terre, puis recrache ce tout en un RIEN qui se disperse. (La tornade diffère du cyclone, comme autrefois l’émotion différait du sentiment, comme aujourd’hui le cauchemar se distingue du rêve. Plus concrètement, la colonne tornadique se tient perpendiculaire et procède par bonds et succions tandis que la cheminée cyclonique avance légèrement penchée, collée à la terre par sa base rotative. L’une danse, l’autre défile. L’une attaque, l’autre fuit. Mais il va sans dire qu’elles n’hésiteront pas échanger leurs caractéristiques à la moindre contrariété, fidèles en cela à l’extraordinaire susceptibilité de la Nature, laquelle est excitée à tout propos et en tout lieu par le facteur humain.) Tout ça progresse sur le tapis des conventions avec l’animosité contenue d’un aspirateur ayant renoncé à s’appeler Hoover. Monte la vache, saute la clôture, le vélo file entre les maïs et les écoliers épars tressautent à plus de vingt-quatre images par seconde dans le côlon mobile. Les bâtiments de ferme, les granges, les mangeoires, les reproductions de mangeoires peintes et suspendues sur les murs intérieurs des bâtiments de ferme, la masse rutilante des engins agricoles, les cailloux arrachés aux labyrinthes des semelles de bottes, les dents crachées dans la poussière, et même le cil déposé sur la pulpe de l’index puis laissé sur l’écorce de l’arbre : envolés, décuplés, dissociés. Tout cela forme tambouille puis monte en gerbe dans le col du cyclone qui brasse et redistribue, se livrant à d’interlopes accouplements, d’iniques collusions, et ce sans le moindre humour puisque nous sommes, rappelons-le, dans l’œil crevé qui n’a rien à voir mais tout à perdre.
La suite sous peu.

19 juin 2010

[extraits coups de cœur] CosmoZ - Claro - Actes Sud - 08/2010

Déjà dit hier, en forme de faux scoop, le 18 août, chez Actes Sud : CosmoZ, de Claro.
Un (très tout petit) peu moins de deux mois à attendre - deux (gros longs) mois à baver.
Donc donc donc.
Pour patienter et pour ceux qui ne facebookent pas : trois extraits.
Copy/pastés de la page CosmoZ.
(On a aimé. Donc donc donc : on partage.)
Les voici dans l'ordre d'apparition à l'écran.
Extrait#1 :

Elfeba et Dorothy croisent un convoi de jeeps, mais personne ne prête attention à elles. Une heure plus tard, au détour d’un buisson, elles se retrouvent au seuil d’une petite vallée encaissée et voient alors, grossi à sa taille réelle, le point qui a attiré leur attention un peu plus tôt.

La chose est si énorme qu’il leur faut en faire plusieurs fois le tour avant de se prononcer sur sa nature.

C’est une baleine et seul le vent respire encore en elle. Peu importe d’où elle vient, si des océans retirés des milliers d’années plus tôt ne l’ont échouée ici qu’enfin, peu importe si le ciel l’a oubliée en s’imaginant soudain ressac, le fait est qu’elle repose bibliquement à même la terre des Indiens fantômes de l’antique Oscuro, morte aux apparences, la peau poinçonnée par la confrérie des crabes, les évents encore tièdes et vibrants, sa nageoire caudale toute grêlée de sable et de mica, imposante dans le silence de ses origines, et comme proportionnée à l’oubli où elle va.

Affranchie des derniers vestiges de sa monstruosité, elle projette, en une aberration insolente, son ombre vers le ciel, laquelle devient nuage, nuage noir.
Non loin de là, les savants de Los Alamos parlent d’orage imminent et refont leurs calculs.


Extrait#2 :
C’était davantage qu’un poste de télévision : c’était un ct-100. Serti dans un meuble en acajou, l’objet occupait une place de choix dans le salon de Matthew Ostrowski, quelque part à Sacramento, Etats-unis. Et la raison pour laquelle semblait émaner de l’engin une petite bulle proclamant “Je dépasserai toutes vos espérances” était simple : ledit téléviseur était doté
d’un écran à tube cathodique et à masque perforé qui utilisait des couleurs phosphorescentes dont la chromaticité correspondait au standard ntsc. Les rouges et oranges du ct-100 étaient plus riches et plus saturés que le rouge-orange et le vert-jaune dont s’enorgueillissaient jusqu’ici ses prédécesseurs. De là, une gamme de couleurs plus étendue, moins timorée. En outre, son masque perforé planaire et son écran à luminophore plat étaient suspendus dans une enveloppe de verre ronde et il disposait d’un syntoniseur à barillet à seize positions, capable de recevoir toutes les combinaisons de chaînes vhf et uhf, fournissant ainsi une image de 45,75 mégahertz et une sortie son if de 41,25 mégahertz. une merveille, en somme, alimentée par 19 500 volts au moyen d’un redresseur 3A3 et d’un stabilisateur en dérivation 6bda. un SynchroGuide horizontal conventionnel s’occupait du reste. L’appareil en question avait coûté près de mille dollars à Matthew Ostrowski, mais ce dernier ne regrettait rien, surtout pas en ce jour de fête où la chaîne cbs avait décidé de diffuser son film préféré, celui qu’il avait vu dix-sept ans plus tôt au Grauman’s Chinese theatre de Los Angeles, le 15 août 1939 précisément, et pendant la projection duquel, à la dix-neuvième minute, il avait réussi, alors que cette pauvre dinde de Garland ouvrait la porte de sa maison pour s’aventurer dans le merveilleux pays d’Oz, à glisser sa langue, non sans insistance, dans la bouche de celle qui, aujourd’hui, au même moment mais dans une autre pièce, contemplait son reflet dans le miroir de sa coiffeuse, une brosse arrêtée dans ses mèches blondes, en proie à une irréversible fêlure, tandis que les deux enfants nés en quelque sorte de ce baiser made in Technicolor®, John et Margaret Ostrowski, respectivement quatorze et seize ans, étaient assis dans la cuisine, devant le poste de radio – un Philips hf 538A encore tout rutilant –, en train d’écouter le dernier bulletin d’information, lequel faisait état de troubles en hongrie, à Budapest.
On était le 3 novembre 1956 au soir et Matthew se réjouissait de revoir – enfin ! – ce film ô combien séminal à ses yeux, Le Magicien d’Oz, diffusé pour la toute première fois à la télévision, qui plus est en couleur, grâce à la coûteuse magie de son ct-100 flambant neuf.
Mais que fabriquait son épouse Cecilia ? Sur la table basse, des blancs de poulet patientaient entre une pile de toasts triangulaires et un bol de pickles, assistés par deux Budweiser encore toutes scintillantes de condensation.
Extrait#3 :
Si le néant est juste une habitude, si mourir n’est qu’un exercice, eh bien me voilà parvenu au bout de la boucle, là où la fleur du même ose enfin recracher sa graine : nous ne sommes que la vengeance de la différence. Oui, quelle belle cervelle que celle qui accouche de cette non-philosophie. Quelque part, je sais que je suis toujours dans ce champ à la croisée des chemins, empaillé et crucifié, insipide et filandreux, à la fois pitre et menace, perchoir à bêtes noires, à bêtes cruelles. Les cris des becs, les gifles des ailes, me faut-il une dernière fois les appeler de toute ma détresse ? C’est toujours la même chose : une douleur me réveille, me transperce, de part en part, non, de paille en paille, c’est peut-être ça le renouveau de la dernière des choses mortes.


Conclusion : on bave toujours.

La suite sous peu.


17 juin 2010

Le 18 août, oZez lire !

18 août 2010.
En plein été.
Même si vous avez les doigts pleins de crème solaire.
Plutôt que de mater les mono et bi kinis.
Ou les strings.
Ou les deux.
Plutôt que de prendre une baffe de votre petite amie, épouse, belle-mère (rayez la mention inutile).
Plutôt que de bronzer idiot.
Le 18 août .


CosmoZ
Par Claro

Traduit du français (France) par Claro.
Actes Sud.

Et vu ce qu'en disent certains petits veinards dont on taira le nom, vous ne le regretterez pas.
En attendant, on bave.










La suite sous peu.

4 mai 2009

[extrait coup de coeur] Golden Gate de Vikram Seth

Extrait coup de cœur de Golden Gate, à valeur de 4eme de couverture :

5.1
La semaine dernière, après avoir écrit
Le chapitre que vous venez juste de lire,
Alors que j'ébauchais d'autres péripéties
Avec une énergie qu'on ne saurait décrire,
Un éditeur - au cours d'une soirée mondaine
(Riche en vins et en mets, d'une classe certaine)
Donnée par Thomas Cook (souhaitons-lui longue vie !)
A l'occasion de la sortie de mon récit
De voyage au Tibet - me prit le bras : "Ami,
Sur quoi travaillez-vous ?" "Un roman..." "Épatant !
Sachez, Vikram, que nous sommes tous impatients..."
"...En vers", ajoutai-je aussitôt, et il blêmit.
"Ma foi, c'est pittoresque en diable", conclut-il
Avant de s'éclipser, d'un pas plutôt fébrile.

5.2
Les enseignants, les éditeurs et les critiques
Furent dubitatifs. Je me sentis de trop.
Un Écrivain semble ma foi fort arthritique
Parmi ces dieux musclés, ces juges magistraux.
Quant à la pâle endive intitulée poète -
Il sait qu'il finira au fond d'une oubliette.
Rimailler, rimailler, tout ça est bien joli ;
Mais est-on sûr d'en tirer un jour du profit ?
Titubant, déprimé, je suis rentré chez moi,
Affaibli dans ma foi. Et mon cœur n'y est plus.
Ma lyre est engourdie. Aussi ai-je voulu,
Afin de remonter mon moral au plus bas,
Réunir des amis, proches quoique méfiants,
Et tenter de répondre à leurs questionnements.

5.3
Bien. Puis-je justifier le recours au sonnet ?
Ces rimes alanguies ? Ma muse désuète ?
La folie surannée de mes vers mitonnés ?
Comment puis-je reprendre le moule obsolète
D'où sortit autrefois un Eugène Onéguine
Et y rouler Reagan en guise de farine ?
La fournée, c'est certain, manquera de levain,
Et ne tiendra jamais jusqu'à demain matin.
Je ne puis, je l'avoue, dûment me justifier.
Mais puisqu'aucun linceul tissé dans la critique
Ne saurait m'épargner une mort prosaïque,
Autant tenter ma chance et qui sait m'amuser.
Si ça marche, tant mieux ; sinon, je ne crois pas
Qu'un peu de théorie retardera le glas.

5.4
(Note du traducteur : Pourquoi l'alexandrin
Et non, fidèlement, le vif octosyllabe
Puisque le tétramètre apparemment contient
Suffisamment de pieds pour imiter le crabe ?
Mais j'ai dû convenir que pour chasser huit pieds
Il fallait trop souvent tordre le chausse-pied
Du tempo et insérer, de force, la forme,
Au risque de causer une allure difforme.)
Mais pourquoi rechigner devant mon choix formel ?
Si j'avais latitude pour considérer
Le bien-fondé d'une autre éventualité
Je le ferais, c'est sûr, mais le temps est cruel
Et l'attente n'est pas un luxe que je puis
M'offrir. Voilà pourquoi mon choix n'est pas gratuit.


Autre extrait coup de cœur, dans lequel on reconnaîtra...

11.10
Effrayé par tant de frivolité forcée
Un hôte tristounet du nom de Kim Tarvesh
Semble absent de la liesse et pris dans ses pensées.
Tarvesh pense à sa thèse - cet entrelacs revêche,
Ce marais spongieux plein de deltas retors
Dans lequel il patauge et qui lui fait du tort.
Tandis qu'autour de lui les voix font un goulash
Sonore, il éprouve soudain un puissant flash
Et murmure : "Il y a fort à parier, je crois,
Qu'une matrice à n dimensions serait
A même de représenter les intérêts
De notre société, à moins que ce ne soit..."
(Ah, pauvre Kim Tarvesh - il est économiste
Et sa pensée, hélas, n'a rien de fantaisiste.)

...une sacrée dose d'auto dérision.

Et si l'on se demande pourquoi Claro s'est attaqué à...ça, la réponse se trouve page 81 :

Liberté et contrainte : ainsi triomphe l'art !


Vikram Seth - Golden Gate - traduit de l'anglais (Inde) par Claro - Grasset

20 février 2009

Das Kapital - Viken Berberian : une tapisserie codée de ses motifs

Un arrêt maladie, on en rêvait : le temps enfin dilaté, généreusement offert par une cochonnerie virale ; enfin pouvoir en profiter pour attaquer par le fondement la pile de "à lire".
Quand ? disait-on l'autre jour.
Maintenant, dit-on en toussant, les yeux larmoyants, abrupto exorbités, et la tête pulsant sous les coups de boutoirs d'une céphalée au beat technoïde (ayeu bobo).
Das Kapital, donc, de Viken Berberian.
Peut-être pas le roman idéal à lire lorsqu'on dispose d'une courbe de température éprise de liberté et s'envolant à l'inverse des cours de la bourse.
Ou peut-être que si.
Das Kapital.
Nanti d'un capital [pas fait exprès, celle-là] sympathie car se déroulant en partie à Marseille [on ne reviendra pas sur Malmousk (sic), déjà évoqué ici-là], Das Kapital se laisse lire sans grande difficulté. En effet, point trop ici de termes spécifiques aux traders et autres hedge fund, sinon pour l'ambiance, serait-on tenté de dire, ou asseoir le personnage principal. Un des personnages principaux, puisqu'ils sont trois.

1/Wayne.
Impossible de ne pas penser à Bruce, alias Batman, et qui sait si Viken Berberian ne l'a pas fait exprès, au demeurant [voir l'allusion à Gotham p.71]. Et de Batman à Bateman, american psycho de Ellis, il n'y a qu'un pas (hop). Warning : le Berberian's Wayne n'a rien du psychopathe de Ellis -- encore que cela puisse se discuter ; leurs modus operandi sont différents, le Wayne de Das Kapital "nettoyant" à plus vaste échelle et, disons, légalement. Ou presque.
Impossible de ne pas faire le rapprochement en lisant, par exemple et entre autres morceaux choisis, l'étalage de marques qui suit :
Il enfila sa chemise Perry Ellis, attacha une montre Carrera autour de son poignet, la première à combiner la précision à la seconde près avec une lisibilité immédiate. Il alla dans la cuisine et ouvrit le réfrigérateur, qui était quasiment vide à l'exception de deux kiwis, d'une bouteille de San Pellegrino, d'une douzaine d'oeufs de caille provenant de chez Dean & DeLuca, et de deux boîtes de caviar Petrossian.

Wayne : matérialiste au possible bien que navigant dans un monde totalement immatériel dont il tire (ou tente de tirer) les ficelles en spéculant/provoquant la chute de son double réel.

2/Le Corse.
Corse, of course, on s'en serait douté. Licencié suite à la faillite de l'entreprise dans laquelle Wayne détenait des parts. Amoureux de la nature. Mais puisque Corse : terroriste [on n'en dira pas davantage].

3/Alix.
Étudiante en architecture, vivant à Marseille, bondissant de toit en toit [Cat Woman ?], bombe [dans tous les sens du terme] volage lâchée dans les pattes de Wayne par Le Corse, son amant et futur ex.

Ces trois-là, selon leurs pulsions, vont se croiser au gré d'une valse...à trois temps, entre New-York, la Corse et Marseille. Entre réel, virtuel, finance. Voire le temps. Ou l'écologie. Ou même : quelques phrases.
Celle-ci, par exemple, qui revient à un moment ou un autre chez chacun, à quelques pages d'intervalle, lorsque la nature est évoquée :
"ses épines, ses ronces et ses buissons, la précision têtue de ses cycles, son calendrier prédéterminé, la tapisserie codée de ses motifs"

On tient peut-être bien là la phrase clé de Das Kapital.
Car qu'est-ce donc, au final, que Das Kapital ?
Une histoire hors du temps [pour preuve l'effondrement du Crystal Palace et la note de bas de page précisant que sa destruction date en réalité de 1882...alors que l'incendie eut lieu en 1936 (!) -- Viken Berberian se serait-il amusé à brouiller les cartes, toutes les cartes ?

Das Kapital ne serait-il qu'une farce tout entière dédiée à l'artifice ? à l'illusion ?], une histoire d'amour, tragique comme il se doit, de marchés financiers [sous titre original : A novel of love and money markets] et d'écologie. Une tapisserie codée de ses motifs ? Certains l'ont remarquée aussi.
Le mélange laisse perplexe. On accroche au début puis on se laisse porter, non pas sans intérêt mais sans intérêt majeur, avec parfois une pointe d'agacement face à certaines phrases trop lyriques ou sentant trop l' "écrit pour le faire". En revanche, il est indéniable que tout le monde en prend pour son grade : traders, terroristes, écologistes, postmodernes. Là, oui, on sourit. Là, oui, la 4e de couv ne ment pas : c'est bel et bien "iconoclaste".
D'où le "se laisse lire", plus haut. Sans déplaisir, juste un "tout ça pour ça" final.
Peut-être bien dû aux conditions de lecture évoquées plus haut.
Peut-être pas.
Une chose est toutefois certaine : dans le catalogue de Gallmeister, Nature writing et polars écolos, Das Kapital ne dépareille pas.

Das Kapital - Viken Berberian - traduit de l'américain par Claro - Gallmeister


La suite sous peu.

14 février 2009

Consider The Lobster, Das Kapital, Autres Electricités & coïncidences

Le petit marché du mois apporte son lot de coïncidences.
Encore des coïncidences ?
Toujours.
Hop ! Démonstration.
Par l'image.
David Foster Wallace : Consider The Lobster.
Cet enchevêtrement de notes de haut/bas/milieu de page ne manque pas de rappeler une certaine Maison des feuilles -- séquence souvenir [ON]

Et justement, nom d'un Mark Z Danielewski, ne serait-ce pas un...Z. que l'on aperçoit, là, au-dessus ?
On se calme, on tourne quelques pages et * paf *

Un Kaléidoscope.
Pour se calmer davantage, on attrape Das Kapital, de Viken Berberian, translaté by Claro.

On lit la 4e de couv (tiens ? Marseille ?) on feuillette et là : Malmousk (p.182).
Pardon ?
Si si : Malmousk, bel et bien cité comme quartier de Marseille.
Sauf que Malmousk s'écrit en réalité Malmousque, par chez nous (ce qui est somme toute normal puisqu'on prononce toutes les lettres). On ignore si cela est écrit pareil dans la VO ou pas, mais l'on suppose que oui.
Bien fait ! Ça lui apprendra, au héros de Das Kapital, à avaler quelques escargots (p.75) !
Mais on ne lui en veut pas parce qu'en feuilletant encore, on tombera sur un nouveau Kaléidoscope...et un chat de Schrodinger qui rappellera aussi une certaine Maison des feuilles à certains demeurés [salut les Chums !] -- séquence souvenir [/OF]
Donc : pardonné.
Enfin, un petit dernier pour la route : Autres Electricités de Ander Monson.

Qui a l'air suffisamment barré pour en baver d'avance.
Surtout quand on tombe sur ça :

Et là, on pense en souriant à un certain Manu, PDG de H.A.N.T.E Inc. [Hello, Partner !] dont le chapitre IX...comporte la même chose ou presque.

A présent, il ne reste plus qu'à lire tout ça.
Oui, mais quand ?


La suite sous peu.



4 février 2009

A tribute to temporel#2

Déjà évoqué il y a quelques temps de cela : le mystérieux Temporel et ses commentaires énigmatiques.
Il y a peu, ce(tte) dernier(e) a livré la clé (cryptée) permettant de dénicher le - n'ayons pas peur des mots - Graal.
Et en son sein, des pépites. Parmi lesquelles on découvrira avec le sourire un IV de garp, de même qu'un IV de Claro et garp.
Un jeu de piste à travers la toile, une expérience ludique pour une découverte...lumineuse. Une façon toute personnelle d'appréhender les oeuvres lues. Dont Pynchon, Claro, Mathias Enard, entre autres et pas des moindres.
Merci...Marylin Rolland.
(où l'on s'aperçoit ainsi que l'esc@rgot avait tout faux dans ses suppositions)

La suite sous peu.

30 décembre 2008

Le papier qui dure une année

En cette fin d'année, pas de coup d'œil dans le rétroviseur.
On s'en chargera ailleurs : mieux vaut être bien accompagné que seul.
Juste quelques mots sur les dernières lectures en date et en cours et à venir :

Sourire noir ou rouge, c'est selon, après La confrérie des mutilés, de Brian Evenson, pour laquelle on n'omettra pas de se rapprocher de l'excellent papier signé Bartleby. Ceci pour ceux qui hésiteraient encore à franchir la couverture.
Pas de sourire, mais une sacrée trace à l'arrière goût tenace après Décomposition, de J. E. Miller, pour lequel on pourra se tourner vers l'ami ThomZ.

Ensuite, on a longtemps hésité face à la pile de à lire - 74 volumes, à ce jour et à l'heure qu'il est - pour finalement opérer un plongeon longtemps reporté dans Les Reconnaissances, de William Gaddis. 150 pages plus tard : époustouflé. Non par ce qui reste à lire sur les deux volumes de 500 pages, mais par ce qu'on vient de lire.
150 pages plus tard : un passage, au hasard parmi ceux notés pour le plaisir qu'on y a pris/qu'on y prend.
Mais aussi ce passage parce qu'on peut y trouver un écho des lectures accomplies cette année, une année riche en ce sens où l'on a pu découvrir/réapprendre à lire et savourer les longs romans - très longs - avec Bolaño (2666) et Pynchon (Contre-jour), pour ne citer qu'eux[où l'on s'aperçoit que l'on vient de céder au syndrome du coup d'oeil dans le rétroviseur]- romans dont on appréhende d'attaquer la face nord mais qui se révèlent si prenants, plaisants qu'on éprouve du regret à en refermer la dernière page. Ce serait négliger que ces pavés laissent de sacrées traces. Inutile donc de préciser que ces longs/denses romans savent rendre la monnaie de la pièce, sont à la mesure de l'effort accompli par ceux qui s'y lancent. S'y enfoncent.


Une fois qu'il s'en fut rendu compte, sa curiosité fut en éveil ; il en détournait les yeux, puis les reportait sur la copie, la complétant dans son esprit ; puis il la regardait de nouveau, comme si, en l'absence momentanée de son regard et par la force de sa propre imagination, elle avait pu être achevée. Mais chaque fois qu'il y revenait, elle était légèrement différente de son souvenir, refusant cet achèvement qu'il avait lui-même accompli.
-- Pourquoi ne veux-tu pas la terminer ? finit-il par demander.
-- Il y a quelque chose dans un... une oeuvre non terminée, une... une chose comme ça où... tu vois ? Où la perfection est encore possible ? Parce qu'elle est là, elle est là tout le temps, tout le temps qu'on essaie de la faire apparaître...

William Gaddis - Les Reconnaissances


Pour finir, ou plutôt continuer à commencer l'année qui vient, on guettera, entre autres, un essai dont il ne nous semble pas avoir entendu parler : Le clavier cannibale, par Claro, en mars 2009.

Bonne fin d'année à tout&tous et
La suite sous peu.

20 novembre 2008

La chasse aux coquilles : 2003/2008

Qu'on ne se méprenne pas : aucune manifestation d'un ego surdimensionné dans ce qui va suivre.
Juste la satisfaction, pour un simple lecteur, d'avoir pu rendre service à des auteurs qu'il apprécie, un service en forme de remerciement pour tant d'heures passées en si bonne compagnie.
Ils nous ont donné à lire, et du bon, quoi de plus normal que de les remercier en les relisant ?


Pour ceux qui ne connaissent pas - les autres se reconnaitront [ça va, les demeurés ?] - retour en :
2003.
Les lettres de Pelafina - Mark Z Danielewski - Trad : Claro - Denoël.




Puis >> septembre 2008

Le Maître des Dragons - Fabrice Colin - Albin Michel - Wiz




Et le lecteur retranché dans sa coquille sourit, remercie.
Trois fois.
Au moins.
(on remet ça quand vous voulez)

Désolé pour le flou (non) artistique des clichés : l'émotion...

La suite sous peu.




13 novembre 2008

Le prix de la (bonne) question

Prix du Meilleur Livre étranger - essai 2008 :
Pourquoi êtes-vous pauvres ?
William T. Vollmann
Traduction : Claro.

On en est deux fois plus satisfaits.

Sans oublier de saluer un des romans qui a fait pousser un *ouf* soulagé à la majorité des Chums du FFC lorsqu'on a appris la (très bonne) nouvelle : Zone, de Mathias Enard, prix Decembre 2008.

On est donc trois fois satisfaits (même si Pynchon... )

La suite sous peu.

10 novembre 2008

Un monde fou, fou, fou, fou - Thomas Pynchon, Contre-jour

Tout a été dit sur Thomas Pynchon.
Tout a été dit sur Contre-jour.
Par ceux qui ne l'ont pas lu.
Par ceux qui l'ont lu mais ont déclaré forfait.
Par ceux qui l'ont lu jusqu'au bout (trahis par l'étrange double éclat qui émane de leurs pupilles).
Par ceux qui ne l'ont pas aimé.
Par ceux qui n'y ont rien compris (sujet de philo : faut-il absolument comprendre pour lire et apprécier - dans quatre heures je ramasse les copies).
Par ceux qui ont compris mais pas tout (rien d'anormal à cela si l'on écoute avec attention ceux qui l'ont lu et aimé et qui connaissent tout [encore que…] de l'écriture Pynchon et de ses romans).
Par ceux qui pynchonwikisent comme des fous et ne laissent presque (ce "presque" flirtant toutefois avec l'infini) rien à décrypter aux pov' lecteurs frenchies - ils sont fous ces anglo-saxons !
Par ceux qui s'en foutent de ce qui peut bien se dissimuler entre les lignes et débitent la lecture cursive au kilomètre.
Alors pourquoi ce papier ?
Parce que pourquoi pas.
Parce que envie de donner envie à ceux de la première catégorie (phrase 3) de découvrir Pynchon, parce que on peut rêver, oui, on peut, rêvons.
Rêvons que d'autres auront ce double éclat évoqué plus haut ainsi que le sourire satisfait de celui qui s'est fait plaisir, a pris plaisir, est allé chercher le plaisir, aussi, pendant deux mois de Contre-jour – lu lentement pour ne rien en perdre.
Parce que membre de la 3e confrérie des Casse Cou (cf. supra, phrase 5) depuis quelques jours, et toujours en tête un monde fou fou fou surpeuplé qui tressaute, se carapate, se cogne, explose, s'envole, glose, rage, peste et baise – et plus si affinités, chante, cligne de l'œil, un monde de dingues, d'acronymes (C.O.N.R.I, T.R.I.P.O.T, S.O.T, B.R.E.F, L.A.C.H.E.U.R.S, et cætera) - le notre, tel qu’il a existé et existe encore - vu d'en haut, d'en bas, de dedans, d'autour, un monde qui n'est peut-être qu'un vaste spectacle, lumineux, minuté à l'extrême, émouvant, traumatisant, réel, irréel, une superproduction dont le script suit les rails improbables du Temps, de la lumière, mêlant tous les genres, dans laquelle les personnages disparaissent, s'évanouissent comme, oui, par magie, pour réapparaitre 400 pages et 20 ans plus tard(1), comme, oui, dans la vie, une comédie humaine, furieusement et dramatiquement humaine, dirigée par.
Par qui, au fait ?
L'auteur des aventures des Casse Cou dont on ne sait rien, absolument rien dans Contre-jour, sinon qu'il a rédigé d'autres volumes de leurs aventures d'adolescents aérostiers - ce qui nous ramène à Pynchon dont on sait si peu (tiens donc ?) - ou un metteur en scène azimuté, un producteur fou, un mathématicien vectoriste spécialiste des machines à voyager dans le temps et la lumière assaisonnées de bilocations vertes et cætera ?(2) Ou un chien lisant du Henry James, ou une Autorité Suprême qui se délite, se dé-déifie dans les ultimes pages ? Ou tout cela à la fois ?

Pause.
Vous pouvez fumer (à l'extérieur du bâtiment, merci !)

Si vous venez de lever un sourcil sinon intrigué du moins surpris : vous êtes mûrs, cuits à point, déjà atteints par le virus - l'antidote est en vente dans toutes les bonnes librairies mais autant prévenir, vous aurez des séquelles.
Parce qu'un roman de Pynchon, d'abord, ça se dompte. Ce qui demande bien entendu...des efforts.

« Il y avait de la musique, mystérieusement audible, tonale mais délibérément fragmentée en dissonances – exigeante, comme si chaque note requérait l’attention. »
(p.1202)

Ensuite, à chacun de chevaucher sa monture comme il l'entend, de suivre telle ou telle piste, de s'attacher à l'humour, à la beauté des phrases - qui a lu Contre-jour, particulièrement Contre-jour (avis personnel qui n'engage que moi), sait combien certaines phrases sont à nul autre auteur pareilles – ou encore à la structure de l’histoire qui largue les amarres en compagnie du club des cinq Casse Cou pour se terminer rue du Départ par un envol vers la grâce (vous avez bien lu) ou, plus simplement peut-être, de se laisser porter.
Quel que soit le choix opéré, et de choix il est beaucoup question dans l’œuvre de Pynchon, le résultat est à la hauteur (on l’a déjà dit plus haut, ligne 5, mais pas que) et vous colle aux neurones au point que je ne suis pas loin d’être tenté de bernarpivoter et de proposer le remboursement à tout lecteur qui n’aimerait pas – ce que je ne ferai pas, les fêtes approchent, je ne travaille pas plus, donc je paie toujours autant et même davantage encore, passons, me contentant de clicher : on ne sort pas indemne de Contre-jour.
Face à cette lumière et ce temps d’exposition, on ne peut qu’être ébloui.

Contre-jour – Thomas Pynchon – Seuil - septembre 2008
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(1) parmi les fréquents : les Casse Cou, Riemann, Renfrew/Werfner
(2) sur la lumière, voir l’excellente étude de Julien Schuh "Against the Day : une alchimie de la lumière", in Cyclocosmia I, éditions association minuscule, septembre 2008. Une version antérieure de cet article peut-être consultée sur Internet : http://www.larevuedesressources.org/article.php3?id_article=818
Autant que la lumière et le temps, la couleur verte apparaît très souvent dans Contre-jour (cf. ‘vy, Contre-jour, journal de lecture 3 : http://ecaillesetplumes.over-blog.fr/article-23701193.html ) de même que les récurrents « et cætera ».
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Bibliographie recommandable chaudement recommandée :
Face à Pynchon – collectif Inculte/Lot49 – Cherche midi – aout 2008
Cyclocosmia I – éditions association minuscule – septembre 2008
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Bonus [piste 1] – Extraits :

"Les cieux étaient interrompus par des nuages orageux gris foncé qui se déplaçaient telle de la pierre en fusion, mouvante et liquide, et la lumière qui se frayait un chemin à travers eux se perdait dans les champs obscurs pour se recomposer le long de la route blême, si bien qu’on ne voyait souvent que la route, et l’horizon vers lequel elle filait. Dally se sentait parfois comme éclaboussée par toute cette exubérance verdoyante, trop de choses à voir, chacune réclamant sa place. Feuilles en dents de scie, en forme de pique, longues et minces, aux extrémités émoussés, duveteuses et veinées, grasses et poussiéreuses en fin de journée – fleurs en cloches et en grappes, violettes et blanches ou jaune beurre, fougères en étoiles dans les coins sombres et humides, des millions de voilages verts tendus devant les secrets nuptiaux nichés dans la mousse et sous les taillis, tout cela passait près des roues grinçantes et cahotantes dans les ornières pierreuses, étincelles visibles seulement dans le peu d’ombre qui les caressait, une pagaille de formes minuscules en bord de route qui semblaient se bousculer pour former des rangs volontairement ordonnés, des herbes dont les amateurs de ginseng connaissaient les noms et les prix sur le marché et dont les femmes silencieuses là-haut sur les contreforts, ces homologues qu’ils ne rencontraient jamais la plupart du temps, savaient les propriétés magiques. Ils connaissaient des destinées différentes, mais chacun était l’envers secret de l’autre, et l’éventuelle fascination qui les unissait était éclairée, sans l’ombre d’un doute, par la grâce."

"Des arcs électriques transperçaient la pénombre violette. Des solutions gémissaient avant d’atteindre leur point d’ébullition. Des bulles s’élevaient hélicoïdalement dans des liquides d’un vert lumineux. Des explosions miniatures se produisaient dans les recoins du laboratoire, projetant des geysers de verre tandis que les ouvriers à proximité se protégeaient derrière des parasols installés à cet effet. Des aiguilles de jauge oscillaient fébrilement. Des flammes sensibles chantaient à des hauteurs différentes. Parmi la masse étincelante des brûleurs et spectroscopes, entonnoirs et flacons, extracteurs centrifuges et Soxhlet, entre les colonnes de distillation de système à la fois Glynsky et Le Bel-Henninger, des filles sérieuses aux cheveux protégés par des résilles inscrivaient des données chiffrées dans des registres, et des gnomes pâles, patients comme des cambrioleurs, plissaient les yeux devant des loupes et ajustaient des trembleurs et des minuteurs avec des tournevis et des pinces. Mais surtout, quelqu’un préparait ici quelque part du café."
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Bonus [piste 2] – le style Pynchon selon Claro (fragment) :

"C’est en cela que Pynchon se révèle un styliste d’exception, c’est-à-dire un écrivain capable de créer des structures syntaxiques inédites obéissant à une rythmique singulière et recourant à un lexique décalé, toutes opérations visant à l’émergence, chez le lecteur, de sensations et de pensées inédites elles aussi – capable, donc, d’inventer une grammaire en devenir, susceptible de paraître absconse ou artificielle, mais uniquement parce qu’elle nous est absolument étrangère, confirmant par là la formule de Proust : « Les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère » On ne s’étonnera donc pas de voir la prose pynchonienne souvent accusé de pécher par excès d’artifice, ou d’être, mystère incongru de la critique littéraire, jugée « trop cérébrale ». Le fait est qu’on ne trouvera pas dans l’œuvre de Pynchon une seule phrase éprise d’anodin, la raison en étant que l’auteur considère la langue non comme un médium commun visant à titiller des sensations partagées, mais à prendre à revers les effets de lecture, à parer d’un air de charade des énoncés sur lesquels on aurait tendance à glisser si leur identification était par trop accentuée. Précisons, et rappelons, que cet art d’essence chamanique, et subversive, est indissociable d’un humour subtil, non point surajouté, mais révélé, inhérent aux motifs qu’il expose et complexifie. « Same thing, only different », comme aiment à le répéter certains de ses personnages, en un clin d’œil possiblement nietzschéen. Retour différé du même, re-visitation de l’étranger, exploration de l’inouï – la prose de Pynchon, qui dans Face au Jour, use et abuse de l’under-statement, des circonvolutions et tergiversations sémantiques autant que syntaxiques, sait donc se moquer, aussi, d’elle-même, l’auteur n’hésitant pas à se pasticher, à forcer certains de ses traits, conscient du risque encouru par tout style parvenu à l’acmé de sa perfection. D’où le côté irrémédiablement potache de l’écrivain Pynchon, son goût des calembours, des chansonnettes, son attrait pour les geeks en tous genre, le cirque, le cabaret, les saillies drolatiques, la magie de quatre sous ; de là également cette fascination pour le mystique qui reste indissociable d’un ridicule sans cesse décliné. Pynchon écrit toujours au bord, à contre-jour, tout contre, dans les interstices, à la faveur de, malgré, au détriment de – délaissant le frontal pour le biaisé, outrant l’obvie pour mieux le déréaliser. "
(in Face à Pynchon - collectif Inculte/Lot49)